L’ordonnance portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis a été adoptée le 30 octobre 2019 et publiée au Journal officiel le 31 octobre 2019. Les dispositions nouvelles issues de ce texte sont entrées en vigueur le 1er juin 2020 à l’exception de celles relatives à la carence du syndic, à la résiliation de son contrat et, pour les petites copropriétés, de la règlementation applicable à la dispense d’ouverture d’un compte bancaire séparé.
Quelles sont les principales nouveautés ?
Le champ d’application du statut de la copropriété
Le champ d’application du statut de la copropriété (article 1er de la Loi du 10 juillet 1965) s’applique désormais impérativement à tout immeuble bâti ou groupe d’immeubles bâtis à usage total ou partiel d’habitation dont la propriété est répartie par lots entre plusieurs personnes.
Les immeubles ou groupes d’immeubles bâtis à destination totale autre que d’habitation dont la propriété est répartie par lots entre plusieurs personnes et les ensembles immobiliers qui, outre des terrains, des volumes, des aménagements et des services communs, comportent des parcelles ou des volumes, bâtis ou non, faisant l’objet de droits de propriété privatifs ne sont désormais régis par le statut de la copropriété qu’à défaut de convention y dérogeant expressément (et sous réserve de constituer une personne morale suffisamment structurée pour en assurer la gestion).
L’objet du syndicat des copropriétaires
Le syndicat des copropriétaires voit son objet étendu à “l’amélioration de l’immeuble” (article 14 de la Loi du 10 juillet 1965).
La responsabilité du syndicat des copropriétaires
Le syndicat des copropriétaires voit sa responsabilité précisée et étendue: “Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires” (article 14 de la Loi du 10 juillet 1965).
L’action en justice contre le syndic
Désormais, “en cas de carence ou d’inaction du syndic, le président du conseil syndical peut également, sur délégation expresse de l’assemblée générale, exercer une action contre le syndic, en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires” (article 15 de la Loi du 10 juillet 1965). Cette délégation doit être donnée à la majorité de l’article 25 de la Loi du 10 juillet 1965. A défaut de conseil syndical, “cette action peut être exercée par un ou plusieurs copropriétaires représentant au moins un quart des voix de tous les copropriétaires” (article 15 de la Loi du 10 juillet 1965)
La révocation du syndic ou sa démission
S’agissant de la révocation du mandat de syndic ou de sa démission, l’ordonnance du 30 octobre 2019 en précise les modalités et ajoute à l’article 18 de la Loi du 10 juillet 1965 la disposition suivante : “Le contrat de syndic peut être résilié par une partie en cas d’inexécution suffisamment grave de l’autre partie“ (conformément au droit commun des contrats).
La désignation et la rémunération du syndic
Le conseil syndical, sauf dispense de l’assemble générale des copropriétaires, est tenu de mettre en concurrence plusieurs projets de contrat de syndic (article 21 de la Loi du 10 juillet 1965). Quant au syndic, il encourt désormais des pénalités de retard lorsqu’il ne transmet pas en temps utile les documents demandés par le conseil syndical (article 21 de la Loi du 10 juillet 1965).
L’ordonnance du 30 octobre 2019 encadre davantage encore la rémunération du syndic tant s’agissant de sa mission que des prestations supplémentaires qu’il peut être conduit à servir : “La rémunération du syndic, pour les prestations qu’il fournit au titre de sa mission, est déterminée de manière forfaitaire. Toutefois, une rémunération spécifique complémentaire peut être perçue à l’occasion de prestations particulières de syndic qui ne relèvent pas de la gestion courante et qui sont définies par décret en Conseil d’État” (article 18-1 A de la Loi du 10 juillet 1965).
La rémunération du syndic pour l’exercice de sa mission doit donc à la fois être fixée forfaitairement et exclusivement de tout autre prestation. Les missions complémentaires du syndic doivent en effet faire l’objet d’un contrat distinct. Quant au projet de contrat du syndic, il doit être accompagné d’une fiche d’information sur les prix et les prestations proposées (selon un modèle fixé par arrêté). Tout manquement aux obligations mentionnées aux premier et troisième alinéas du présent article est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale.
Les obligations du syndic sortant
L’article 18-2 de la Loi du 10 juillet 1965 dispose désormais qu’en cas de changement de syndic, l’ancien syndic est tenu de remettre au nouveau syndic, dans le délai de quinze jours à compter de la cessation de ses fonctions, la situation de trésorerie, les références des comptes bancaires du syndicat et les coordonnées de la banque.
Le syndic sortant doit également remettre, dans le délai d’un mois à compter de la même date, l’ensemble des documents et archives du syndicat ainsi que, le cas échéant, l’ensemble des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou aux lots gérés dans un format téléchargeable et imprimable.
Dans l’hypothèse où le syndicat des copropriétaires a fait le choix de confier tout ou partie de ses archives à un prestataire spécialisé, il est tenu, dans ce même délai, d’informer le prestataire de ce changement en communiquant les coordonnées du nouveau syndic.
Dans le délai de deux mois suivant l’expiration du délai mentionné ci-dessus, l’ancien syndic est tenu de fournir au nouveau syndic l’état des comptes des copropriétaires ainsi que celui des comptes du syndicat, après apurement et clôture.
La désignation des membres du conseil syndical
L’ordonnance du 30 octobre 2019 élargit la liste des personnes parmi lesquelles les membres du conseil syndical peuvent être désignés. Il s’agit désormais : des copropriétaires, de leurs ascendants ou descendants, des associés, des accédants ou acquéreurs à terme, de leurs conjoints, des partenaires liés à eux par un pacte civil de solidarité, de leurs représentants légaux, ou leurs usufruitiers (article 21 de la Loi du 10 juillet 1965).
La délégation de pouvoir accordée au conseil syndical
Désormais, l’assemblée générale des copropriétaires (lorsque le conseil syndical est composé d’au moins trois membres), peut, par décision prise à la majorité des voix de tous les copropriétaires, déléguer au conseil syndical le pouvoir de prendre tout ou partie des décisions relevant de la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou votant par correspondance (la majorité dite “de l’article 24”) (article 21-1 de la Loi du 10 juillet 1985).
“La délégation de pouvoirs ne peut toutefois porter sur l’approbation des comptes, sur la détermination du budget prévisionnel, ou sur les adaptations du règlement de copropriété rendues nécessaires par les modifications législatives et règlementaires intervenues depuis son établissement.” (article 21-1 de la Loi du 10 juillet 1985).
L’assemblée générale fixe le montant maximum des sommes allouées au conseil syndical pour mettre en œuvre sa délégation de pouvoirs (article 21-2 de la Loi du 10 juillet 1985).
La délégation de pouvoirs mentionnée à l’article 21-1 est accordée au conseil syndical pour une durée maximale de deux ans. Elle est renouvelable par une décision expresse de l’assemblée générale (article 21-3 de la Loi du 10 juillet 1985).
Le syndicat des copropriétaires souscrit, pour chacun des membres du conseil syndical, une assurance de responsabilité civile (article 21-4 de la Loi du 10 juillet 1985).
Les décisions du conseil syndical pour l’exercice de la délégation de pouvoirs mentionnée à l’article 21-1 sont prises à la majorité de ses membres. En cas de partage des voix, le président du conseil syndical a voix prépondérante (article 21-5 de la Loi du 10 juillet 1985).
Le conseil syndical rend compte de l’exercice de sa délégation de pouvoirs devant l’assemblée générale votant l’approbation des comptes; il établit un rapport en vue de l’information des copropriétaires (article 21-5 de la Loi du 10 juillet 1985).
L’assemblée générale des copropriétaires
Dans l’hypothèse d’un démembrement du droit de propriété, “le copropriétaire” est représenté par le nu-propriétaire et non par l’usufruitier (à défaut d’accord contraire entre eux) (article 23 de la Loi du 10 juillet 2019). En cas de désaccord entre plusieurs nus-propriétaires, c’est le Président du Tribunal judiciaire qui désigne lequel représentera “la pleine-propriété” (article 21-5 de la Loi du 10 juillet 1985).
L’ordonnance du 30 octobre 2019 vient encadrer le vote par correspondance rendu possible par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite “Loi ELAN”) (article 17-1 A de la Loi du 10 juillet 1985 et article 24 de la Loi du 10 juillet 1985).
Tout copropriétaire peut désormais solliciter du syndic la convocation et la tenue, à ses frais, d’une assemblée générale pour faire inscrire à l’ordre du jour une ou plusieurs questions ne concernant que ses droits ou obligations (article 17-1 AA de la Loi du 10 juillet 1985).
Jusqu’à présent, lorsque l’assemblée générale des copropriétaires n’avait pas décidé à la majorité prévue à l’article 25 mais que le projet recueillait au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires composant le syndicat, la même assemblée pouvait procéder à un second vote à la majorité prévue à l’article 24. Cette passerelle est étendue à tous les votes (article 25-1 de la Loi du 10 juillet 1985).
La loi fait revivre l’article 26-1 de la Loi du 10 juillet 2015 et qui avait été abrogé par Loi du 13 juillet 2006 : “Nonobstant toute disposition contraire, lorsque l’assemblée générale n’a pas décidé à la majorité prévue au premier alinéa de l’article 26 mais que le projet a au moins recueilli l’approbation de la moitié des membres du syndicat des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, représentant au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, la même assemblée se prononce à la majorité des voix de tous les copropriétaires en procédant immédiatement à un second vote.“.
Les travaux d’accessibilité aux frais d’un copropriétaire
Désormais, un copropriétaire peut faire réaliser, à ses frais, des travaux pour l’accessibilité des logements aux personnes handicapées ou à mobilité réduite qui affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble (article 25-2 de la Loi du 10 juillet 1965). A cette fin, le copropriétaire notifie au syndic une demande d’inscription d’un point d’information à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, accompagnée d’un descriptif détaillé des travaux envisagés. Jusqu’à la réception des travaux, le copropriétaire exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage. L’assemblée générale peut, à la majorité des voix des copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux par décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels, ou leur non-conformité à la destination de l’immeuble.
Les travaux d’intérêt collectif affectant les parties privatives
La loi nouvelle dispose désormais qu’un copropriétaire ne peut faire obstacle à l’exécution, même sur ses parties privatives, de travaux d’intérêt collectif régulièrement décidés par l’assemblée générale des copropriétaires, dès lors que l’affectation, la consistance ou la jouissance des parties privatives n’en sont pas altérées de manière durable (article 9 de la Loi du 10 juillet 1965). Il ne s’agit donc plus des seuls travaux listés aux articles 24, 25 et 30 de la Loi du 10 juillet 1965.
Toutefois la réalisation de tels travaux sur une partie privative, lorsqu’il existe une autre solution n’affectant pas cette partie, ne peut être imposée au copropriétaire concerné que si les circonstances le justifient (article 9 de la Loi du 10 juillet 1965).