Les garanties légales des constructeurs

Par Jean-Marin LEROUX-QUÉTEL
Docteur en droit
Avocat associé
Spécialiste en droit immobilier
Date de mise à jour : 30 mai 2025

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Les garanties légales des constructeurs protègent celui qui commande un ouvrage relevant des techniques du bâtiment. Avant réception, le maître de l’ouvrage est dans un rapport strictement contractuel avec le ou les constructeurs. Après achèvement, l’ouvrage doit demeurer solide et fonctionnel durant des délais fixés par la loi. Au-delà, les constructeurs ne sont plus tenus à aucune garantie.
Qui sont les constructeurs ?

Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage, ce qui inclut les entreprises du bâtiment mais également les bureaux d’étude et les contrôleurs techniques.

Mais non le diagnostiqueur.

Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire.

Que cette personne soit ou non un professionnel !
Une clause de non garantie des vices-cachés ne permet pas au vendeur non-professionnel de se prémunir contre une éventuelle action de l’acquéreur fondée sur les garanties légales des constructeurs.

Le constructeur de maison individuel, le vendeur d’immeuble à construire (VEFA), le vendeur d’immeuble à rénover ou encore le fabriquant d’un “élément pouvant entraîner [sa] responsabilité solidaire” (EPERS) avec un locateur d’ouvrage.
Qui sont les bénéficiaires ?
Les garanties bénéficient au maître de l’ouvrage, c’est-à-dire le client, simple particulier, professionnel ou promoteur, propriétaire du terrain ou titulaire du droit de construire qui a commandé l’ouvrage.
Et le locataire qui fait fait réaliser des travaux ?
Le locataire qui fait réaliser un ouvrage en conserve la propriété jusqu’au terme du bail sauf stipulations contraires (comme la clause d’accession immédiate). Il a donc la qualité de maître d’ouvrage et peut invoquer le bénéfice des garanties légales des constructeurs.

L’action en garantie décennale bénéficie à tous les acquéreurs successifs de l’immeuble comme étant un accessoire de l’ouvrage.
L’action en responsabilité de droit commun se transmet également à l’acquéreur.
Qu’est-ce qu’un ouvrage pour l’application des garanties ?
Tous les édifices et plus généralement toute espèce de construction, tout élément concourant à la constitution d’un édifice par opposition aux éléments d’équipement.

Les éléments d’équipements faisant indissociablement corps avec l’ouvrage bénéficient de la garantie décennale (v. infra).

3 conditions :
- L’ouvrage doit résulter d’un contrat de louage.
- L’ouvrage doit être de nature immobilière.
- L’ouvrage doit être un ouvrage de construction.
Quel est le point de départ des garanties ?

L’exécution des travaux (phase contractuelle) se termine lorsque le maître d’ouvrage accepte de recevoir les travaux que ce soit implicitement (notamment par le règlement complet du prix et la prise de possession des lieux) ou par la régularisation d’un document appelé procès-verbal de réception.
Lorsque le maître d’ouvrage n’est pas pleinement satisfait des travaux mais qu’il entend « globalement » les accepter, il peut exprimer dans le procès-verbal de réception des réserves. Elles ont pour objet de maintenir à l’égard du maître d’ouvrage son obligation de résultat en maintenant sa responsabilité contractuelle

La réception couvre les désordres et non-conforrmités apparents : un trou au milieu du mur, une fenêtre ovale là où elle aurait dû être rectangulaire, un mur peint en jaune alors qu’il avait été commandé en vert, etc.
Il est donc essentiel d’être attentif lors de la réception de l’ouvrage sauf à être assisté pour cette opération de son maître d’œuvre.
Quelles sont les garanties ?

La garantie de parfait achèvement
Les travaux terminés, le maître d’ouvrage n’est en principe plus en droit d’exiger que le constructeur s’exécute parfaitement en reprenant des non-conformités ou des menus désordres sauf au cours de l’année qui suit la réception et pour les seuls désordres et non-conformités non-apparents lors de la réception.
Cela vaut également pour les désordres et non-conformités signalés soit lors de la réception, soit dans l’année de la réception.
Que faire ?
L’entrepreneur doit, après notification, effectuer les reprises ; à défaut, elles peuvent être exécutées aux frais et risques de l’entrepreneur défaillant. L’action à l’encontre de l’entrepreneur défaillant doit impérativement être engagée dans le délai d’un an et un mois courant à compter de la réception. Une simple mise en demeure (par lettre recommandée avec demande d’avis de réception n’est donc pas suffisante).
La garantie d’isolation phonique
La garantie d’isolation phonique n’est due que par le vendeur d’un immeuble après achèvement (ou le vendeur en l’état futur d’achèvement).
Aux termes de l’article L. 111-11 du Code de la construction, le vendeur est garant à l’égard du premier occupant et pendant un an à compter de la prise de possession du logement, de la conformité du logement aux normes minimales d’isolation phonique

Garantie de bon fonctionnement

L’ouvrage peut comprendre des éléments d’équipement qui, parce qu’ils ne font pas indissociablement corps avec, en constituent des accessoires, des « satellites » dont le mauvais fonctionnement ne peut à lui seul porter atteinte à la destination de l’ouvrage, ne peuvent relever de la garantie décennale.
Ces éléments doivent avoir été réalisés concomitamment à l’ouvrage.
S’agissant des locaux destinés à un usage professionnel :
La garantie de bon fonctionnement ne bénéficie pas aux éléments d’équipement dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage (article 1792-7 du Code civil).

La garantie décennale
La garantie décennale oblige le constructeur à réparer les « dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination » (article 1792 du Code civil).
Au-delà du terme de ce délai d’épreuve, le constructeur n’est plus tenue d’aucune garantie envers le maître d’ouvrage.
La seule survenance d’un désordre permettra d’engager la responsabilité du constructeur sans que le maître d’ouvrage ait à prouver sa faute.

Seule la souscription d’une assurance décennale est obligatoire.
Et pour les désordres ne relevant d’aucune garantie légale ?
La réception des travaux met en principe fin à la responsabilité contractuelle du constructeur.
Les garanties légales ne couvrant cependant pas, au-delà de l’année de parfait achèvement, les désordres ne relevant pas de la garantie décennale, la Cour de cassation a consacré le principe de survit de la responsabilité contractuelle pour les dommages dits « intermédiaires », soit les seuls dommages (non les non-conformités) ne relevant pas de la garantie de parfait achèvement, de la garantie biennale ou de la garantie décennale.
S’agissant de la responsabilité de droit commun, le maître d’ouvrage doit rapporter la preuve d’une faute du constructeur. Seules les garanties légales instituent une responsabilité de plein droit.
L’action du maitre d’ouvrage se prescrit par dix ans à compter de la réception. Cette solution jurisprudentielle contraire à la loi a été consacrée par la réforme de la prescription opérée par la loi du 17 juin 2008.

Le délai d’action est de 10 ans à compter de la réception.
Cette solution jurisprudentielle contraire à la loi a été consacrée par la réforme de la prescription opérée par la loi du 17 juin 2008.
Et avant réception ?
La location d’ouvrage (ou marché de travaux) est un contrat qui oblige le constructeur (artisan, entreprise du bâtiment, promoteur, etc.) à réaliser pour son client, le maître d’ouvrage, un ouvrage conforme à ses choix et aux règles de l’art (règles techniques du bâtiment).
Tant que les travaux ne sont pas considérés comme terminés par le maître d’ouvrage, ce dernier est en droit d’exiger que ce qui a été commandé soit parfait sur le plan technique et bien évidemment conforme à sa commande (par exemple la couleur des revêtements muraux extérieurs, le dimensionnement de l’ouvrage, la position des fenêtres, etc.).
Si le maître d’ouvrage n’est pas satisfait, il peut engager la responsabilité du constructeur pour obtenir des dommages et intérêts à hauteur du coût des travaux nécessaires pour obtenir l’exécution parfaite du contrat.

Le délai d’action est celui de droit commun (5 ans).
La responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur avant réception doit être engagée dans les cinq ans de la réalisation des travaux litigieux, la réforme de la prescription par la loi du 17 juin 2008 ne visant qu’à consacrer la prescription décennale appliquée par la Cour de cassation aux dommages intermédiaires (voir ci-dessous).