La vente d’immeuble en l’état futur d’achèvement

Me Jean-Marin LEROUX-QUETEL

Par Jean-Marin LEROUX-QUÉTEL
Docteur en droit
Avocat associé
Spécialiste en droit immobilier

Date de mise à jour : 30 mai 2025

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La vente en l’état futur d’achèvement est un contrat permettant d’acheter un bien immobilier qui n’est pas encore construit ou en cours de construction. Le vendeur s’engage à livrer le bien immobilier (maison, appartement, etc.) dans un certain délai.

Ce contrat, protecteur de l’acquéreur, est obligatoire dès lors que (conditions cumulatives) :
L’immeuble vendu est destiné  à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation ;
Il stipule le versement de fonds avant l’achèvement de la construction.

Le secteur protégé : un achèvement garanti

Le secteur impose notamment au vendeur de garantir à l’acquéreur l’achèvement de l’immeuble en cas de défaillance.
Deux options :
– Soit une ouverture de crédit permettant de payer les travaux restant à réaliser,
– Soit un cautionnement bancaire, l’une et l’autre étant indéterminés en leur montant.

Le vendeur peut lui préférer une garantie de remboursement qui ne jouera alors que dans l’hypothèse d’une résolution de la vente pour défaut d’achèvement. Elle garantit à l’acquéreur la restitution des versements effectués au profit du vendeur.

Le contrat peut autoriser le vendeur à substituer une garantie à l’autre en cours d’exécution.

Le respect d’un délai de livraison


Le délai de livraison est aussi important que l’immeuble promis.

Si la livraison est faite avec retard (au regard des stipulations contractuelles), l’acquéreur pourra se prévaloir de cette inexécution contractuelle pour demander réparation du préjudice que ce retard lui cause. Cette indemnisation peut avoir été d’ores et déjà organisée par les parties au moyen d’une clause pénale.

Le juge veille à ce qu’il soit fait un usage modéré de la clause pénale pour éviter les abus.


L’indication d’un délai pour délivrer l’immeuble étant un élément essentiel du contrat de vente d’immeuble à construire, son non respect peut permettre à l’acquéreur d’obtenir la résolution du contrat de vente. Il faudra alors justifier d’un retard important.

Il est habituellement stipulé une clause permettant d’allonger le délai de livraison en cas de survenance d’un certain nombre d’évènements tels que des jours d’intempéries, la défaillance d’entreprise, etc. Ces clauses qui libèrent le constructeur de son obligation de livrer l’immeuble dans un certain délai ne sont pas abusives dès lors qu’elles sont conçues de manière raisonnable et limitées dans le temps.

Le paiement du prix convenu

La seule véritable obligation de l’acheteur sur plans est celle de payer le prix convenu.

35 % du prix à l’achèvement des fondations
70 % du prix à la mise hors d’eau
95 % du prix à l’achèvement de l’immeuble

L’immeuble est achevé lorsque sont exécutés les ouvrages et installés les éléments d’équipement indispensables à l’utilisation de l’immeuble conformément à sa destination. Tout le reste relève du parachèvement nécessaire à la livraison de l’immeuble. 
Attention :
- L'achèvement fait courir le délai d'action (cinq ans) de l'acquéreur en nullité de la vente ;
- Elle met fin à la garantie bancaire d'achèvement (ce qui est logique).

Le solde (5 %) est réglé lors de la livraison (c’est-à-dire après parachèvement de l’immeuble).

L’acquéreur qui constate un vice de construction ou un défaut de conformité peut s’opposer au règlement de ce solde à condition d’offrir de le consigner entre les mains du notaire qui a reçu la vente ou à la Caisse des dépôts et consignations.

L’acquéreur  qui ne paie pas le prix s’expose à :
– devoir payer une indemnité de retard (1 % max. par mois);
– la mise en oeuvre la clause résolutoire si elle est stipulée dans le contrat de vente ;
– la résolution judiciaire du contrat.

La livraison d’un immeuble conforme

L’immeuble achevé, il peut être livré.
Aucun formalisme n’encadre la livraison qui peut prendre la forme d’une simple remise des clés.

L’immeuble livré doit être conforme à la chose promise au contrat (qui doit par ailleurs être l’exacte reprise de celle prévue au contrat de réservation); il ne s’agit donc pas de non-conformités aux règles de l’art mais uniquement au regard des stipulations contractuelles :
– le contrat préliminaire,
– l’acte de vente et ses annexes ou les documents visés et déposés au rang des minutes du notaire (par ex. le dossier de demande de permis de construire,
– voire sous certaines conditions les documents publicitaires.

La non-conformité peut tenir :
Au fait que l’immeuble livré n’est pas identique à l’immeuble promis dans ses dimensions, ses caractéristiques ou ses équipements (par exemple des surfaces inférieures à celles indiquées sur les plans) ;
Au fait que manque des prestations ou certaines caractéristiques prévues par le descriptif (par exemple : absence de certains aménagements ou équipements).

A ces non-conformités qui correspondent à la lettre des textes, la jurisprudence a ajouté celles tenant au non respect des normes légales et réglementaires.

Le constructeur est en droit de stipuler des clauses lui offrant une certaine liberté pour apporter des modifications à la chose promise. Il s’agira souvent de clauses accordant des tolérances et des marges s’agissant des dimensions de l’immeuble (par exemple une marge d’erreur de 3% pour les surfaces).

Ce peut être également la possibilité de remplacer les matériaux prévus par des matériaux de qualité identique ou supérieure. Ces clauses ne doivent toutefois pas créer un déséquilibre significatif au profit du constructeur sous peine d’être réputées non écrites parce qu’abusives.

Le défaut de contenance de l’immeuble vendu en état futur d’achèvement est soumis aux articles 1619 et suivants du Code civil qui autorise une marge de 5% (sauf stipulation contraire).

En application de ces textes, la différence de superficie ne donne lieu qu’à une diminution du prix au prorata le surface manquante. L’acquéreur ne peut prétendre à aucune autre indemnisation. Il doit par ailleurs agir dans l’année de la livraison.

Que faire face à un défaut de conformité apparent ou à un vice de construction existant lors de la livraison ?

L’article 1642-1 du Code civil dispose que « le vendeur d’un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l’expiration d’un délai d’un mois après la prise de possession par l’acquéreur, des vices de construction ou des défauts de conformité alors apparents« .

Cela signifie que le vendeur d’un immeuble à construire est nécessairement tenu de garantir les défauts de conformité apparents et les vices de construction quand bien même ils seraient apparents lors de la livraison de l’immeuble.

C’est là une différence majeure avec le droit commun de la vente qui ne protège l’acquéreur que contre les vices cachés.

Toute clause contraire est nulle.

Peu importe aussi l’expression ou non de réserves dans un éventuel procès-verbal de livraison, cette garantie est due pour tous défauts de conformité visibles (pour un profane) et tous les vices de constructions existants lors de la prise de possession de l’immeuble. Et encore faut-il que l’acquéreur ait pleinement conscience de l’ensemble des conséquences résultant du vice de construction ou du défaut de conformité.

L’immeuble ayant été acquis avant sa construction, l’acquéreur doit disposer d’un temps suffisant pour, après sa livraison, en découvrir les éventuelles non-conformités contractuelles.

Ce délai est de 1 mois sauf clause contractuelle plus favorable.

Souvent le contrat de vente impose l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Cette clause (dite “de décharge”) nous paraît contraire au texte (d’ordre public). Nous sommes d’avis qu’elle n’est pas licite dans le secteur protégé.

L’acquéreur a tout intérêt à se ménager la preuve qu’il a découvert la non-conformité ou le vice de construction apparent dans le mois de la livraison.

Cette garantie couvre non seulement les non-conformités dites “apparentes” mais également les vices de construction visibles (pour un profane) lors de la livraison.

Le délai pour agir (délai de forclusion) est d’un an à compter de la date à laquelle le vendeur peut-être déchargé des vices de constructions et des défauts de conformité apparents.

La livraison suivant le plus souvent une réception sans réserve des travaux, ce délai pour agir sera concrètement d’un an et un mois à compter de la prise de possession de l’immeuble par l’acquéreur.

Peu importe en définitive le moment où le vice de construction ou le défaut de conformité est apparent pourvu que ce soit dans le délai d’un an et un mois.

S’agissant des sanctions, l’acquéreur peut exercer à son choix l’action rédhibitoire (résolution de la vente) ou l’action estimatoire (réduction du prix). Toutefois, le vendeur-promoteur peut échapper à toute sanction s’il s’engage à réparer le vice ou le défaut de conformité apparent.

Il convient donc de distinguer les non-conformités apparentes des non-conformités cachées.

Les défauts de conformité cachés à la livraison relèvent du droit commun de la responsabilité contractuelle.
– Pour les défauts mineurs, la reprise peut être exigée par l’acquéreur avec toutefois la nouvelle limite imposée par la dernière réforme du droit des contrats. Le juge peut en effet refuser l’exécution forcée en cas de « disproportion manifeste » entre le coût de l’exécution et son intérêt pour le créancier.
– Si la mise en conformité (ou exécution forcée) s’avère impossible, le contrat pourra être résolu, soit en totalité si le défaut est substantiel et rend l’immeuble impropre à son usage, soit partiellement s’il est mineur. Cette résolution partielle se traduit par une diminution du prix de vente.

Le délai pour agir est de dix ans à compter de la réception des travaux par le vendeur-promoteur.
Ce n’est donc pas la livraison qui marque le point de départ du délai pour agir.

Ce délai n’est que d’un an s’agissant du défaut de contenance.

S’agissant des vices de constructions non existant lors de la livraison

Le vendeur-promoteur, réputé constructeur, doit enfin garantir l’acquéreur pour les vices de construction relevant des garanties biennale et décennale.

Aux termes des dispositions de l’article 1646-1 du Code civil, le vendeur d’un immeuble à construire est tenu, envers les acquéreurs à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres constructeurs sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792 et suivants du Code civil.

L’acquéreur bénéfice également de la responsabilité contractuelle « résiduelle » (ou théorie des dommages intermédiaires) pour tous les dommages n’entrant pas dans le champ d’application de l’une ou l’autre de deux garanties légales.

C’est par exemple le cas des dommages purement esthétiques comme des microfissures en façade. En revanche la mise en œuvre de cette responsabilité est particulièrement difficile puisqu’elle suppose de rapporter la preuve d’une faute du vendeur-promoteur qui est nécessairement distincte de la faute constructive commise par l’entreprise qui a réalisé l’ouvrage défectueux.

La garantie phonique

Le vendeur-promoteur doit ensuite garantir l’acquéreur contre les défauts d’isolation phonique. Aux termes de l’article L. 111-11 du Code de la construction et de l’habitation, « le vendeur ou le promoteur immobilier est garant, à l’égard du premier occupant de chaque logement, de la conformité [aux exigences minimales requises en matière d’isolation phonique] pendant un an à compter de sa prise de possession ».

Le délai d’un an pour agir est court. Aussi la Cour de cassation admet-elle que l’acquéreur puisse également agir dans le délai d’épreuve de la garantie décennale (dix ans) dès lors que le ou les défauts d’isolation phonique sont tels qu’ils rendent l’immeuble impropre à sa destination. Certaines décisions ont également admis des actions fondées sur un défaut de conformité aux qualités acoustiques promises par le vendeur-promoteur.

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