Le bail commercial

Par Jean-Marin LEROUX-QUÉTEL
Docteur en droit
Avocat associé
Spécialiste en droit immobilier
Date de mise à jour : 30 mai 2025

Dissocier le commerce de la propriété immobilière implique de pérenniser la jouissance de l’immeuble par le commerçant tout en garantissant à son bailleur la perception d’un loyer économiquement “juste”. La recherche de cet équilibre a conduit au régime relativement complexe des baux commerciaux.
Quand ?
Vous avez dit 3 – 6 – 9 ?
Non ce n’est pas la table de multiplication de 3 même si ce n’est pas tout à fait sans rapport !
– Le 3-6-9 est le bail « classique » de 9 ans, soit la durée minimum d’un bail commercial.
– Les 3ème et 6ème anniversaires marquent des dates importantes dans la vie du contrat.

Les 3ème et 6ème anniversaires
C’est d’abord l’occasion donnée au locataire de mettre fin au contrat.
Le locataire peut sauf clause contraire résilier sans motif particulier le bail.
Le bailleur est moins bien loti. Il dispose de la même faculté mais pour des motifs bien précis :

Le congé doit être donné au moins 6 mois avant l’expiration de la période triennale en cours par acte extra-judiciaire (ou LRAR pour le seul locataire).
C’est aussi l’occasion de faire un point sur le loyer. C’est ce qu’on appelle la révision triennale.
Le bailleur et le locataire peuvent demander à voir fixer le loyer à la valeur locative de marché du local commercial.

Mais il existe un plafond : l’évolution comparée de l’ILC* ou de l’ILAT**
* ILC : indice des loyers commerciaux
** ILAT : indice des loyers des activités tertiaires
SAUF évolution notable des facteurs déterminant la valeur locative statutaire (sauf prix couramment pratiqués dans le voisinage).
Au terme du bail (9 ans)
Si aucune partie ne prend d’initiative (congé avec ou sans offre de renouvellement pour le bailleur, congé ou demande de renouvellement pour le locataire) le bail se prolonge tacitement aux mêmes conditions.

Si l’une le bailleur offre le renouvellement ou si le locataire le demande :
Sauf accord bailleur/preneur, le loyer est fixé à la valeur statutaire du local commercial mas avec un plafond : l’évolution comparée de l’ILC* ou de l’ILAT** SAUF évolution notable des facteurs déterminant la valeur locative.
S’il existe une modification notable des éléments déterminant la valeur locative (valeur statuaire), il n’existe plus de plafond. Pour amortir ce “déplafonnement”, la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dite « loi PINEL » limite la progression du loyer en résultant à 10% par an. C’est ce que la pratique appelle « le bouclier PINEL ».

Le bail entre dans sa douzième année (à défaut de renouvellement)
Si une parties prend l’initiative du renouvellement : le plafond que nous avons évoqué saute automatiquement ; c’est ce qu’on appelle le déplafonnement.
– Peu importe l’évolution comparée de l’ILC* ou de l’ILAT**.
– Le “bouclier PINEL” ne joue pas.
Le loyer sera fixé à la valeur statutaire du local commercial (sauf accord des parties évidemment).

Il existe d’autres exceptions au plafonnement :
– Les baux d’une durée supérieure à 9 ans.
– Les terrains et les locaux à usage de bureaux ;
– Les locaux dits “monovalents” (ex : les salles de cinéma, les garages automobiles, etc.)
Comment déterminer la valeur statutaire ?

En théorie :
Cinq critères légaux, énumérés à l’article L. 145-33 du code de commerce, permettent de déterminer la valeur locative de marché :
– les caractéristiques du local considéré ;
– la destination des lieux ;
– les obligations respectives des parties ;
– les facteurs locaux de commercialité ;
– les prix couramment pratiqués dans le voisinage.
En pratique :
La détermination de cette valeur consiste essentiellement à pondérer la surface réelle des locaux et à appliquer à cette surface pondérée un prix au mètre carré. Le mètre carré de surface pris ainsi en compte est appelé « mètre carré pondéré ».
Le prix au mètre carré est fonction des prix couramment pratiqués dans le voisinage pour des locaux équivalents (mêmes caractéristiques, même destination et même facteurs locaux de commercialité).
En cas de désaccord entre les parties, c’est le juge des loyers commerciaux du Tribunal judiciaire territorialement compétent qui fixera le montant du bail renouvelé. Il ordonnera avant-dire-droit une mesure d’expertise.

Pour une action en fixation du loyer de renouvellement, le juge des loyers commerciaux doit être saisi dans un délai de deux ans à compter de la date d’effet du nouveau bail.
Le droit au renouvellement
Le locataire a un droit au renouvellement de son bail. Ce droit est d’ordre public. Toute clause contraire est réputée non écrite.
Si le bailleur refuse le renouvellement ou s’il donne congé sans offre de renouvellement, il doit verser au locataire une indemnité d’éviction…

SAUF si le bailleur justifie d’un motif légitime de non-renouvellement :
L’inexécution d’une obligation contractuelle ou légale;
– La cessation sans raison sérieuse et légitime de l’exploitation du fonds;
– S’il est établi que l’immeuble doit être totalement ou partiellement démoli comme étant en état d’insalubrité reconnue par l’autorité administrative ou s’il est établi qu’il ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état;

Le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d’une indemnité d’éviction, doit saisir le tribunal avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné.
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